EURO dépité

Pour Frédéric Waseige, le chroniqueur de Sport/Foot Magazine, le vainqueur portugais mérite tout notre respect mais pas toute notre admiration.

2-0 contre le Pays de Galles. Le Portugal a gagné un match. Incroyable. Par plus d’un but d’écart. Encore plus incroyable. Ça ne leur était plus arrivé en compétition depuis octobre 2013. Si si, c’était contre le… Luxembourg. Et ce, avec un sniper qui ratait souvent sa cible. Sur les 76 buteurs de cet EURO, Ronaldo était 74e au pourcentage de réussite dans ses tentatives.

Beaucoup de déchets mais le recyclage devenait de l’or. Une sorte d’alchimiste à la formule connue de tous mais dont lui seul sait en tirer le nectar. Avec pour laborantins des joueurs acquis à sa cause. Un vrai collectif. Pas toujours beau mais talentueux dans la performance.

Il est loin le temps où l’entraîneur de l’équipe nationale portugaise devait avoir trois adjoints. Un pour gérer les joueurs de Benfica, un ceux de Porto et un ceux du Sporting de Lisbonne. Les trois grands clubs du pays. Une équipe en forme de monstre à trois têtes dont le talent s’évaporait dans les rivalités. Maintenant une seule tête dépasse. Plus d’évaporation mais la concentration d’un talent qui mène en finale.

Une finale promise à la France et offerte par l’Allemagne. Après deux ans de matchs amicaux et cinq autres pas trop difficiles dans cet EURO, les Français jouaient contre plus fort. Mais ils n’ont rien volé puisque ce sont les Allemands eux-mêmes, qui leur ont ouvert leur coffre-fort.

La meilleure équipe du tournoi est dehors avec beaucoup de remords. Mais  » No remords anymore  » pour le petit poucet de cette finale. Samuel Umtiti. Le conte de fées de cet EURO. 1ère titularisation en équipe de France = un quart de finale d’un EURO, la deuxième une demi et le voici donc en finale.

On se rappelle des mots prononcés par Didier Deschamps au mois d’octobre.  » Pourquoi je reprend pas Umtiti ? Vous ne regardez pas la Ligue des Champions ou quoi ?  » Façon de dire que le garçon n’avait pas le niveau. C’est vrai qu’avec Lyon il s’était fait  » bouffer  » par un certain Laurent Depoitre.

C’est ça le foot. D’un jour à l’autre, d’un mois à l’autre, le paradis s’offre à vous. Un paradis qui devient un enfer le temps d’une finale. Le temps de 120 minutes où le non-jeu s’est fait l’apôtre de l’enjeu. Les Français ont déjoué. Se sont adaptés. Ils ne devaient pas le faire.

Deschamps a joué à la loterie, celle des tirs au but, alors que les bons numéros il les avait avant même le tirage.

Que le Portugal se refasse une beauté dans le manque de charme de son jeu, on peut comprendre. Mais pas la France. Deschamps a joué à la loterie, celle des tirs au but, alors que les bons numéros il les avait avant même le tirage.

Tu es pays organisateur, on t’a offert un parcours sur mesure, tu viens d’éliminer le champion du monde, tu as un joueur qui transforme en but tous les peut-être et puis tu as le meilleur joueur adversaire qui se blesse.

Bordel, joue ton jeu! Va chercher dans ta qualité la vérité d’un sport où l’audace doit redevenir une vertu. Doit être l’exemple. Au lieu de ça, la belle France a voulu jouer la laideur des faubourgs. Des contours d’une ambition qui se noie dans la peur du vide.

Le vide il est là. Ils ont perdu un match avec le sentiment de ne pas l’avoir joué. Y a pas pire. Paul Pogba, cette Formule 1 a dû jouer comme une 2 CV. Bridée la puissance qui avance à 10.000 tours minutes. Il a tourné en rond autour du rond central. Blaise Matuidi aussi. Dimitri Payet était cramé, Antoine Griezmann noyé dans le filet tendu par les Portugais.

Avec comme sardine en chef un certain Pepe. Elu homme du match d’une finale d’un EURO. Rien à ajouter si ce n’est respect pour ce champion d’Europe. Mais bon, y a quand même un blème. A travers ce boucher reconverti, en ce doux mois de juillet, dans la charcuterie fine, le foot a révélé toute la magnificence de son incohérence.

C’est donc sans ballon que l’on gagne des matchs. C’est donc le courage, l’abnégation, le sens du sacrifice, du collectif, du respect des autres, de l’application de la peine que la victoire se dessine. Et pourquoi pas ? Le Portugal mérite tout notre respect. Mais pas toute notre admiration. Pas grave.

L’essentiel est que cet EURO a redessiné tous les codes de la beauté et de la laideur. Il a ouvert la porte à tous les possibles. Merci !

Par Frédéric Waseige

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