© ISOPIX

Et si Dortmund avait gagné au change avec Yarmolenko?

Ousmane Dembélé était un artiste. Lui est un guerrier. Andriy Yarmolenko, l’Ukrainien à l’histoire atypique qui jouera mardi en Ligue des champions avec le Borussia Dortmund contre le Real Madrid, a déjà fait oublier le Français, transféré à Barcelone.

« Ousmane qui? » La presse allemande fait bien sûr dans la provocation, car Dembélé a laissé dans la Ruhr le souvenir d’un talent incommensurable aux éclairs de génie. Mais il était aussi un joueur de 19 ans en apprentissage, très discret dans le vestiaire, fragile physiquement et capable de perdre ses nerfs sur le terrain.

Yarmolenko, à 27 ans, a également du talent à revendre. Mais la ressemblance s’arrête là. Puissant (1,89 m), dur au mal, batailleur et plus adroit face au but, l’Ukrainien est surtout un homme mûr dont l’influence sur l’équipe se ressent déjà après quelques matches. Avant de recevoir Madrid, Dortmund est leader du championnat avec la meilleure différence de buts de toute l’histoire de la Bundesliga après six journées: 19 buts marqués contre un seul encaissé.

L’anecdote rapportée par son coéquipier Nuri Sahin résume assez bien la personnalité du nouveau venu. Avant le premier match de Ligue des champions à Tottenham (défaite de Dortmund 3-1), l’international turc s’est approché de lui dans le vestiaire et, comme il le fait pour les nouveaux venus, lui a dit: « Reste cool ». L’Ukrainien l’a regardé et a souri. « J’ai soudain eu l’impression qu’il essayait de me dire ‘Non, toi, reste cool' », rapporte Sahin, admiratif.

Michael Zorc, le directeur sportif du Borussia, est également enthousiaste: « C’est incroyable à quelle vitesse il est devenu déjà un joueur qui fait la différence pour nous ». Dortmund a laissé partir Dembélé pour presque 150 millions d’euros. Yarmolenko est arrivé du Dynamo Kiev pour six fois moins. Car en ces temps d’ascensions fulgurantes et de salaires mirobolants, l’Ukrainien a peut-être manqué un train dans sa jeunesse.

– ‘Shevchenko m’a beaucoup appris’ –

Star dans son pays, trois fois champion, deux fois vainqueur de la Coupe, trois fois désigné joueur de l’année, meilleur buteur du championnat la saison dernière, il n’a longtemps pas cherché à monnayer son talent dans un grand club d’Europe de l’Ouest.

Peut-être par souci de préserver son équilibre personnel et familial. A 13 ans, il avait vécu une douloureuse expérience: recruté par le centre de formation du Dynamo, il était rentré chez lui rapidement, incapable de supporter la séparation avec sa famille. L’incident aurait pu lui coûter sa carrière. Mais les recruteurs du grand club de Kiev n’ont jamais douté de son talent, et l’ont récupéré trois ans plus tard, cette fois pour de bon.

Il avoue avoir eu, dans sa jeunesse, une autre chance: celle de côtoyer l’idole nationale Andriy Shevchenko, avec lequel il a formé l’attaque du Dynamo Kiev et de l’équipe nationale de 2009 à 2012. « Andriy Shevchenko m’a beaucoup aidé », dit-il, « il m’a donné ses trucs, notamment de buteur. Regarder où est le gardien, savoir quand je dois tirer à ras de terre ou en hauteur… »

Et aujourd’hui, regrette-t-il de ne pas s’être expatrié plus tôt? « En aucun cas », répond-il: « On peut dire qu’il faut partir dans un grand championnat à 20 ans, parce qu’on y progresse plus vite. Mais d’un autre côté, je suis maintenant un joueur totalement accompli. Je sais de quoi je suis capable. Le Dynamo a fait de moi ce que je suis ».

Cet homme mûr ne manque d’ailleurs pas d’ambition, puisqu’il a refusé une offre faramineuse de Chine, préférant un défi sportif en Europe à une pré-retraite dorée. A 27 ans, il lui reste quelques bonnes années pour rattraper le temps perdu au plus haut niveau européen.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire